Ce week-end dernier, le cours des cryptomonnaies a chuté de 8,5 % en 24 h. Durant la semaine qui a précédé, l’ETH a baissé de 25 % et les altcoins ont connu une baisse de 60 % ou plus, au cours des sept jours qui ont précédé cette chute brutale. Le Bitcoin quant à lui, a perdu 16 % et s’est retrouvé en dessous de la barre des 35 000 dollars (source), un niveau en dessous duquel il n’avait plus été valorisé depuis juillet 2021. Ce qui fait qu’aujourd’hui nous pouvons constater que le bitcoin a perdu la moitié de sa valeur, depuis novembre.
Pendant ce temps, le marché des NFT continue de croitre. La première plateforme d’échange de NFT, OpenSea, a battu un record en enregistrant la semaine dernière un volume de vente de 3,5 milliards de dollars. Le marché des objets de collection de la NBA, progresse fortement. Les ventes de la collection sur le marché secondaire ont augmenté de 72 % au cours des 30 derniers jours, selon les données de CryptoSlam, avec 53,8 millions de dollars de ventes (source).
On le sait, le marché des crypto est volatil, mais qu’est-ce qui explique cette baisse importante sur le marché crypto, alors que le marché des NFT continu à prospérer et à se développer ? Voici des éléments de réponse.
Les cryptomonnaies face à la souveraineté des États
Cette baisse soudaine, est en grande partie la résultante d’un climat géopolitique difficile. En début d’année, la FED a décidé de remonter ses taux directeurs pour pallier les pertes de pouvoir d’achat induits par une inflation ayant atteint les 7 %, un records jamais atteint depuis 40 ans (source). Ceci a eu pour effet, de changer la tendance de marché, avec la perspective d’une hausse des taux directeurs et ainsi d’une hausse du coût du crédit, les investisseurs ont préféré jouer la prudence et se retirer du marché crypto.
On a également eu des pressions à la baisse sur le cours suite aux manifestations au Kazakhstan contre le minage de bitcoins. Ces manifestations ont entrainé la suspension d’internet et un arrêt provisoire du minage alors que le pays était devenu le deuxième pays mineur de bitcoin (en savoir plus). Résultat ? Cet évènement inopiné a provoqué la perte de puissance de calcul sur réseau bitcoin et ainsi entrainé un ralentissement et une baisse de l’efficacité du réseau qui s’est résorbé peu de temps après (source). Aujourd’hui, la situation au Kazakhstan demeure compliquée. Le gouvernement a de nouveau coupé l’approvisionnement en électricité des mineurs de Bitcoin, et ce, jusqu’à fin janvier (source).
À cela s’ajoute les préoccupations liées à la consommation énergique de la technologie blockchain (en savoir plus). Une question sensible qui a sûrement envoyé un mauvais signal au marché et freiné de nouveaux investissements.
Entre-temps, la position ambiguë de la Russie vis-à-vis des cryptomonnaies alimente le climat de défiance sur la scène internationale. En effet, en décembre 2021 Vladimir Poutine avait appelé à la prudence et appelé à une régulation des crypto. La semaine dernière, la position de la Russie sur la question des crypto semble se durcir. La banque centrale de Russie avance vouloir interdire le bitcoin et les cryptomonnaies, s’alignant ainsi sur les décisions prises par les grandes puissances que son l’Inde et la Chine (en savoir plus). Mais finalement, le gouvernement à exprimer son intention de réguler les crypto et non de les interdire.
Tous ces éléments ont, d’une manière ou d’une autre, entrainés la baisse du cours du Bitcoin. Cependant, l’annonce de la hausse des taux directeurs de la Fed a certainement été un élément déterminant. Voyons maintenant, dans quelle mesure cette annonce l’a été.
La nouvelle politique de la FED et ses conséquences
Avec la pandémie et le ralentissement de l’économie, le marché crypto a attiré de nouveaux adeptes, mais également des investisseurs en quête de rendements élevés et de placement “sûrs” face aux conséquences de la politique accommodante menée aux États-Unis et en Europe.
Le marché crypto a ainsi largement profité des taux bas (pratiquement abaissé à 0 %) et des liquidités abondantes qui en découle depuis le début de la crise sanitaire. Cette liquidité abondante s’est par ailleurs retrouvé sur le NASDAQ, où les valeurs des grands noms de la tech ont considérablement augmentés dans le même temps. Pour prendre la mesure de ce phénomène, prenons l’exemple de Tesla.
Alors qu’en février 2021 l’action Tesla se négociait pour moins de 400 dollars, un mois plus tard, elle a connu une hausse de 130 % et s’échangeait à plus de 1000 dollars. À ce moment-là, Tesla enregistrait un chiffre d’affaires de 8,77 milliards de dollars et un bénéfice net de 331 millions de dollars et ainsi augmenté de 21 % et figurait parmi les grands gagnants de cette pandémie au côté d’Amazon, dont le chiffre d’affaires avait augmenté de 40 %.
Cependant, en juin 2021, Morgan Stanley déclarait prévoir que Tesla produirait 2 millions de voitures par an au cours des dix prochaines années, mais que le cours actuel de son action implique une production beaucoup plus importante : « À 1000 dollars, nous pensons que le stock se déprécie d’environ 4 millions d’unités » d’ici à 2030 (source).
L’analyste Adam Jonas de Morgan Stanley, déclarait d’ailleurs que cette valorisation provenait d’« investisseurs orientés vers la technologie » qui considéraient l’évaluation de Tesla comme raisonnable et « dans le cadre de discussions » entre des noms technologiques à forte capitalisation comme Amazon, Google ou Apple (source). En effet, de manière générale, plus les taux sont bas et plus les actions des big tech à fort potentiel de croissance augmentent, car le crédit est alors moins cher. On y voit de futurs investissements (rentables) de la part de ces dernières.
Dans le même temps, ce surplus de liquidité a amené les investisseurs (particuliers et entreprises) vers le marché crypto pour y trouver des rendements élevés et à cela, s’ajoute le contexte exceptionnel de la pandémie qui a conduit à une hausse de l’inflation notamment aux États-Unis.
La pandémie et le surplus de liquidité en circulation a fortement contribué à ce que l’essentiel de la masse monétaire sur le marché crypto soit en dollars, les premiers acheteurs de Bitcoin étant américains.
- Pour aller plus loin : La cryptomonnaie, une solution contre l’inflation ?
Durant les deux dernières années, le cours du Bitcoin a augmenté de 700 % et l’année dernière, le cours a augmenté de 219 % environ et a quasiment triplé pour atteindre les 60 000 dollars, un niveau record jamais atteint auparavant.
Le retournement de la politique menée aux États-Unis a donc eu l’effet contraire. D’ailleurs, à l’annonce de la Fed, le Bitcoin est passé d’environ 46 000 à 42 000 dollars pour ensuite dégringolé jusqu’à atteindre les 30 000 dollars. En effet, à l’atteinte des 60 000 dollars, certains investisseurs, s’était déjà retiré du marché.
Aux dernières nouvelles, la Fed a décidé de remettre à plus tard la première phase de hausse de ses taux directeurs et il semblerait que le chômage aux États-Unis ait retrouvé son niveau d’avant crise (source). Précisément, la banque centrale prévoit de passer à 0,9 % en moyenne fin 2022, à 1,6 % fin 2023 avec deux hausses prévues dans l’année, puis à 2,1 % en 2024 avec deux hausses également et enfin à 2,5 % à long terme (source).
Ainsi, même si la Fed met un coup de frein à sa politique de contraction du crédit et en conséquence, de l’investissement et de la consommation afin d’agir sur la production des entreprises et ainsi réduire la hausse généralisée des prix, il semblerait que le bitcoin ne face plus autant l’unanimité qu’avant.
À moins que l’adhésion à la technologie grandissent et que la technologie séduise pour ce qu’elle est et ce qu’elle peut apporter, au-delà de sa simple capacité à conserver la valeur d’une monnaie. Du moins, c’est le constat que l’on peut faire pour les États-Unis.
En résumé la baisse récente du Bitcoin a été provoqué par l’annonce de la hausse des taux directeurs de la Fed, accompagné par un climat de défiance à l’échelle international à l’encontre de Bitcoin alors que le marché avait déjà baissé. Par ailleurs, à l’échelle individuelle, il n’est pas rare de voir des investisseurs se tourner vers les NFT. Un marché porté par des grandes marques comme Adidas, Nike ou encore, par META qui semble avoir abandonné son projet Diem pour les métavers. Loin d’être disruptif comme le Bitcoin, les NFT permettent d’innover et d’apporter des solutions diverses (traçabilité, fidélisation, etc.), sources de valeurs pour les entreprises et les projets qui se fond en lien avec ces objets du numérique, notamment lorsqu’ils s’inscrivent dans un projet lié aux métavers. Peut-être le signe que 2022 sera l’année des NFT ?